Essais et recherche

Le Psychanalyste et les discours ambiants
Par Yves Dechristé   publié le 18 novembre 2024

L’élection de Trump : événement ou reflet de société ?

Les élections américaines du 5 novembre nous ont confronté à la surprise de voir Donald Trump l’emporter avec un écart qui a démenti tous les sondages, lesquels pronostiquaient que les deux candidats étaient au coude à coude. Diverses explications ont été avancées, notamment conjoncturelles ; manque d’attention pour telle ou telle catégorie de la population, pour la dimension économique, la question de l’immigration. Cette démarche politique ou explicative qui fait crédit au juste sens pour en rendre compte nous semble insuffisante pour expliquer que plus de 50% des Américains aient voté pour Donald Trump. Cette démarche positiviste ne dissimule-t-elle pas une vérité, qui de ne rien en vouloir savoir, renforce la résistance aux changements, à l’inflation de mesures pédagogiques ou législatives ? Nous proposons ici de prendre de la hauteur, de sortir des discours communs, pour essayer d’appréhender autrement cette réalité, ce Malaise dans la civilisation. C’est-à-dire essayer de s’approcher de ce qui cause cette souffrance de l’homme, liée à sa condition elle-même, voire renforcée par le politique ?

Entrelacs
Par Bruno BEUCHOT   publié le 1 novembre 2023

La vieille dame et les chiens

Charlotte for ever

C’était au temps où Serge Gainsbourg chantait Charlotte for ever (au début des années 80). Je la revois encore, le geste ample, le cigarillo à la main, citant Freud d’une voix tonnante dans sa critique de La naïveté du comportementalisme[2] et dessinant, au tableau d’une salle de l’Institut Goethe de l’Université de Strasbourg, son schéma des actes[3], un pentagone, produit de L’entraînement mental, avec en son centre un personnage à la Chelon coupé en deux à hauteur de ceinture, pour représenter la division subjective du sujet entre le comportement (les phénomènes de surfaces visibles) et la structure
Elle nous enseignait cela : alors que les vieux livres de psychiatrie étaient jadis remplis de paroles de patients, ceux que l’on trouvait aujourd’hui étaient remplis de statistiques et de diagrammes pseudo-scientifiques.

Entre divan et théories
Par Nicolas JANEL   publié le 1 septembre 2023

Place de la psychanalyse… c’est à quel sujet ?

Nicolas Janel est intervenu à l’ASSERC en mars 2023, en précisant sa thématique par le sous-titre : « Castration réelle chez le sujet par lésions somatiques ? ». Vous retrouverez dans cet article l’ensemble de son propos.

Entre divan et théories
Par Carolina SPYER VIEIRA ASSAD   publié le 1 septembre 2023

Argent et psychanalyse : Notes sur l’absence de contrepartie financière dans l’accès à la clinique psychanalytique

Cet article est un extrait du mémoire écrit par Carolina Spyer Vieira Assad dans le cadre du Diplôme Universitaire « Bases Conceptuelles des Psychothérapies Analytiques », à la Faculté de Médecine de Strasbourg.

Le Psychanalyste et les discours ambiants
Par Martin ROTH   publié le 1 mai 2023

Quelques points introductifs à une réflexion sur la place du psychiatre, psychanalyste en institution

Je donnerai quelques points sur une manière d’appréhender l’expérience de psychiatre et de psychanalyste au sein d’un hôpital psychiatrique, en l’occurrence dans un pôle de pédopsychiatrie. Le choix d’une pratique hospitalière et universitaire oriente forcément cette position. La pratique analytique est plurielle (différences entre un psychanalyste en libéral, en institution, en fonction de sa place dans l’institution, etc.).

Entre divan et théories
Par Frédérique RIEDLIN   publié le 1 avril 2023

« Hymen, trop hymen » – Réflexions à partir d’une lecture hystérique du « Tabou de la virginité » de Freud

Le genre de texte qui peut mettre l’ambiance, entre rire et rogne. Entre un Freud assez brut et un Freud bluffant qui coiffe notre époque au poteau. Un côté « grande tripière » d’habitude attribué à Mélanie Klein.
Est-ce bien raisonnable me dira-t-on en ces temps de sidération tous azimuts, de torpeur sociale, de malaise de la civilisation, et de bascule guerrière, de déterrer ces quelques lièvres, ces quelques marottes à première lecture un peu datées pour nous, alliant considérations anthropologiques d’avant Lévi-Strauss et pragmatisme clinique un peu brut de décoffrage ? N’est-ce pas mettre le feu aux poudres ?
Je crois que les poudres n’ont pas attendu pour prendre feu, sur fond de coups de boutoir sociaux-politiques, et que, au contraire, il faut pouvoir nommer les préjugés, les croyances immatures et la trame archaïque. C’est bien la maxime freudienne reprise à l’Enéide de Virgile : « Si je ne peux fléchir les Dieux d’en haut, je remuerai les Enfers »

Entre divan et théories
Par Claude OTTMANN   publié le 1 avril 2023

À propos du séminaire XXIII de Lacan, Joyce le sinthome, 1975-1976

Les deux « échos des séminaires » de ce mois concernent le séminaire de Jean-Richard Freymann du 14 mars 2023, et peuvent être lus en articulation : Claude Ottmann nous propose le texte de son intervention dans le séminaire, et Cyrielle Weisgerber tisse quelques questions, à l’intersection des réflexions amenées par les deux orateurs.

Entrelacs
Par Aurélia MIGIOIA-JEANNOT   publié le 1 mars 2023

La psychanalyse ou le sens singulier du langage…

« Voilà donc la gloire pour toi.
– Je ne comprends pas ce que vous voulez dire, dit Alice.
Humpty Dumpty sourit dédaigneusement.
– Évidemment que tu ne comprends pas – pour cela il faut que je te l’explique. Je veux dire : Voilà un argument décisif pour toi !
– Mais ‘‘gloire’’ ne veut pas dire ‘‘argument décisif’’, objecta Alice.
– Lorsque j’utilise un mot, dit Humpty Dumpty avec mépris, il signifie exactement ce que je choisis qu’il signifie – ni plus, ni moins.
– La question est de savoir si vous pouvez faire signifier aux mots autant de choses différentes, répondit Alice[1]. »

« Moi, je me fais fort de faire dire dans une phrase, à n’importe quel mot, n’importe quel sens[2] » aurait pu lui répondre Lacan. Le langage, peut-il ne pas être subversif ? Chaque mot prononcé n’est-il pas fondé sur le malentendu ? Sans l’avoir conceptualisé ainsi, Lewis Carroll l’illustre pourtant de manière délicieuse.

Entre divan et théories
Par Yves DECHRISTÉ   publié le 1 mars 2023

Le nœud de la névrose

La difficulté du travail avec le névrosé est qu’il est sans cesse dans le monde de la représentation. Il faut qu’il donne consistance aux choses, qu’il ait des idées, donne du sens, l’Autre est subjectivé. Ce que Freud avait relevé lorsqu’il conclut à l’irréductibilité de l’œdipe. Est-ce une fatalité ? Essayer de sortir du monde de la représentation, rompre avec le sens, c’est ce que Lacan tente avec l’introduction de la catégorie du Réel dont nous n’avons qu’une idée très approximative, l’invention de l’objet a à partir d’une déduction logique, et l’écriture du nœud borroméen.
La question est de savoir comment aller au-delà de l’œdipe, d’interroger la clinique non pas à partir de nos fantasmes, mais à partir de la structure figurée par le nœud, le nouage de ces trois dimensions que sont le Réel, le Symbolique et l’Imaginaire.

Par chemins de l'école
Par Jean-Louis DOUCET-CARRIERE   publié le 1 mars 2023

Un chemin vers le compagnonnage

Dans la rubrique « Par-chemins de l’Ecole », vous trouverez des échos des travaux de l’Ecole Psychanalytique de Strasbourg, et de ses modes de transmission, en particulier compagnonnage et témoignage.

« Le sens n’est nulle part. Nous le traçons avec de la fumée et le vent n’est jamais très loin. » Salah Stétié

Drôle d’aventure que ce deuxième témoignage qui amène à prétendre être analyste compagnon.

Étymologiquement, le compagnon est celui avec qui on partage le pain, comment partager le pain qu’a pétri l’expérience analytique ? Est-ce qu’être analyste compagnon c’est in fine, devenir co-pin ou co-pain avec l’analyste accompagné ? Certainement non.

Pour rester dans cette image, je dirais que la tâche de l’analyste compagnon est plutôt de prélever le levain de sa propre analyse pour permettre à celui qu’il accompagne de fabriquer son propre pâton.

Entre divan et théories
Par Claude OTTMANN   publié le 1 février 2023

Commentaire de la leçon n°1 du 13 novembre 1973 –  Des Noms du Père au Nœud Borroméen

Des Noms du Père aux non-dupes qui errent

Jacques Lacan s’apprête à commencer son onzième séminaire le 20 novembre 1963 quand lui est notifiée, la veille, sa radiation de la liste des didacticiens de la SFP. Il ne tiendra donc qu’une seule séance[1] sur « Les Noms du Père ».

Dix ans plus tard, le 13 novembre 1973, il donne la première leçon d’un séminaire intitulé « Les non-dupes errent ». Il y a évidemment un rapport entre les deux, bien que Lacan eût déclaré qu’il ne livrerait pas ce qui avait été censuré en 1963.

Entre divan et théories
Par Marie-France Schaefer   publié le 1 février 2023

Une psychanalyse émancipée

Marie-France Schaefer poursuit les réflexions de son article paru dans La lettre de la FEDEPSY n°10, autour de la thématique du « genre ». Elle mêle références « théoriques » et échos directs de la pratique, une forme d’association libre côté fauteuil, qui lui permet d’aborder de près les arêtes de la clinique.

Le Psychanalyste et les discours ambiants
Par Thierry VINCENT   publié le 1 février 2023

Mort de la psychiatrie

Thierry Vincent revient sur une de ses lectures : Le Quotidien du Médecin en date du 1er juillet[1] affiche un dossier à sa une, intitulé : « Entre neurologie et psychiatrie ces TNF qui dérangent ».

Associations libres
Par Emmanuelle CHATELAT   publié le 1 février 2023

Rébellion et Résistance – Eloge de la théorie du manque

Emmanuelle Chatelat fait écho à l’invitation à l’écriture parue dans le numéro de décembre, ainsi qu’à différents textes de La Lettre et d’ailleurs.
De plume en plume elle entrelace pour nous quelques références poético-chansonnières, puis philosophiques et psychanalytiques, pour essayer de saisir dans les tressages quelque chose de l’indicible du sujet et de l’humain.

Entre divan et théories
Par Nicolas JANEL - Liliane GOLDSZTAUB - Martin ROTH   publié le 1 janvier 2023

Textes en dialogues : « Le pas à dire phobique ? »

Nicolas Janel a proposé son article « Le pas à dire phobique ? » aux commentaires de Liliane Goldsztaub et Martin Roth.

Vous souhaitez suivre leur discussion ?

Entrelacs
Par Aurélia MIGIOIA-JEANNOT   publié le 1 novembre 2022

L’éthique du sujet : fil conducteur d’une psychanalyse

Synopsis du mémoire soutenu le 14 septembre 2022, dans le cadre du Master 2 Psychanalyse – Université Paul Valéry, Montpellier 3 – sous la direction de Bernard Victoria.

Entre divan et théories
Par Yves DECHRISTÉ   publié le 1 novembre 2022

Croyances et références

L’expérience nous a montré que les analysants pris dans le transfert analytique, où le sujet est pris dans l’ordre du langage, branché sur la dimension du sujet supposé savoir, n’étaient pas étouffés par les discours universels avec leur accumulation de sens, complotistes en l’occasion. Ce qui n’a pas empêché l’exacerbation des difficultés subjectives, des lignes de fragilité propres à chacun, liées aux incidences concrètes de la vie de tous les jours. Cela amènerait-il à penser que les paramètres mis en jeu dans l’analyse protégeraient des phénomènes de certitude ?

Entrelacs
Par Patrick GAUTHIER-LAFAYE   publié le 1 juillet 2022

À l’ombre de Grothendieck et de Lacan

Ce livre est l’histoire d’une rencontre entre un mathématicien, Alain Connes, et un psychanalyste et qui n’ont pas eu peur d’échanger, sans parti pris, des idées sur leurs disciplines et ont rapidement dû constater qu’existaient de nombreux points de convergence entre elles.

En rapport avec l’écriture d’un nouveau livre, je me trouvais à Cerisy-La-Salle pour assister à un colloque ayant pour thème : « Les autres noms du temps ». Ce colloque m’a donné l’occasion de rencontrer Alain Connes, qui faisait partie des intervenants, et de lui poser une question, à mes yeux essentielle, permettant d’imaginer un avenir à la psychanalyse : existe-t-il ou pas l’équivalent du Nom-du-Père en mathématiques, garantissant qu’une équation n’est pas folle ? « Oui, les mathématiques archaïques » me répondit-il aussitôt. À ma demande, il m’expliqua longuement ce qu’étaient ces mathématiques archaïques.

Entrelacs
Par Hervé GISIE   publié le 1 juillet 2022

Mathématiques ◊ Psychanalyse – Une invitation au travail

La scientificité de la psychanalyse est une question qui a suscité, et suscite encore, d’importants débats. On se souviendra qu’en 2013, Moustapha Safouan dans son livre La Psychanalyse. Science, thérapie – et cause[1] y avait apporté ses réflexions et des prises de position tranchées à ce stade de son parcours. Questionné de façon plus précise à propos d’une éventuelle distinction entre psychanalyse thérapeutique et psychanalyse didactique, il évoquait que la question du désir qui se situe là serait venue à Lacan à un moment où il voulait une transmission scientifique de la psychanalyse, à une époque où il croyait que la psychanalyse était transmissible scientifiquement. On comprendra mieux sa déception quant aux résultats attendus de la passe, dont la procédure visait à la production d’un savoir sur « le désir qui fait l’analyste ». Que cette expérience soit un échec, au sens de l’échec de l’attendu d’un savoir sur un désir, ne veut pourtant pas dire que le désir de l’analyste ne réponde à un certain nombre de critères pour dire qu’une analyse a un peu été opératoire et qui font partie de critères éthiques.

Entre divan et théories
Par Dimitri LORRAIN   publié le 1 juillet 2022

Eloge de la psychanalyse comme lien de parole

Au regard de l’évolution contemporaine des discours et des mécanismes psychiques, j’aimerais ici insister sur un point qui me semble particulièrement important. Tout un ensemble de discours collectifs avancent de nos jours que la psychanalyse sous sa forme actuelle serait « dépassée » – souvent pour justifier sa minoration institutionnelle. Or cela ne me semble pas juste.

En effet, s’il s’avère que la psychanalyse a pu souvent être dénaturée et devenir dogmatique, et ainsi perdre en créativité, cela n’est heureusement pas toujours le cas. Elle existe aussi de nos jours sous une forme rigoureuse et créative (ce qui est la même chose). Dans ce cas-là, je dirais qu’elle se centre sur la création d’un lien de parole qui crée la situation analytique en tant que telle[1]. Sous cette forme, la psychanalyse élabore sur les critiques qui lui sont adressées. De plus, elle remet au travail ses apports, afin de prendre en compte les subjectivités sous leur forme contemporaine.

 

Entre divan et théories
Par Marie-France SCHAEFER   publié le 1 juillet 2022

Le monde est-il fou ?

C’est la question que je me suis posée vendredi dernier après avoir écouté mes patients.
Les psys entendent des histoires qui semblent invraisemblables mais ma dernière patiente lâche à la fin de la séance que son fils est devenu une fille et que sa fille se prépare à devenir garçon. J’ai deux patients adolescents en thérapie qui sont en cours de transformation. J’avoue avoir du mal à écouter « cela ».
Je me console en me disant que cela doit être pire en psychiatrie, ce que l’on peut entendre « du Monde ». Une de mes stagiaires, lorsque je travaillais en milieu scolaire près de la prison, m’avait dit qu’elle trouvait que les scénarios des films étaient exagérés mais que la réalité qu’elle avait entendue étaient encore bien pire que dans les films.
Quand même…. Parmi toutes ces « folies », il y en a une qui m’interroge, me touche au-delà des autres. Ce sont les enfants, les adolescents qui se livrent à la médecine pour changer de sexe.

Par chemins de l'école
Par Martin ROTH   publié le 1 juillet 2022

Espace-temps analytique : échos de l’École

L’agora de l’école est un lieu de fructueuses discussions. C’est même un espace de débat. Non pas au sens à la mode, médiatique, où chacun a un avis radical qui entraîne une guerre stérile mais jouissive pour le public. Mais au sens d’éviter de se battre physiquement et cela par l’échange verbal, l’élaboration à plusieurs. Ce débat permet à chacun d’en sortir avec un plus grand discernement de sa position singulière qui le distingue de l’autre. En cela, il y a débat analytique !

Une autre fonction de l’agora renvoie à une étymologie lointaine : le tribunal. Tribunal particulier où le juge n’attribue pas une sentence, mais permet un jugement d’existence. L’agora devient cet espace où le vide central participe à la transmission d’une parole qui rencontre l’écoute d’une assemblée. L’Autre surgit silencieusement de l’espace tiers, il fait résonner le discours qui s’énonce et se constitue dans le même mouvement.

Par chemins de l'école
Par Myriam RIEGERT   publié le 1 juillet 2022

Transfert(s) et Rencontre(s)

Au décours des journées de l’EPS de juin 2022, cadre de prises de parole sur les effets du premier témoignage et vers le deuxième témoignage, je propose d’y revenir déjà un peu autrement.

Il y a le cheminement de l’analyse personnelle et de la supervision. Si la question de l’analyse personnelle rejoint « la découverte de l’inconscient freudien à partir de son expérience singulière » ce que nous propose Jean-Richard Freymann comme formulation pour le premier témoignage, la question de la supervision, ou de l’analyse de contrôle, me paraît avoir un rapport plus direct encore avec cet acheminement vers le devenir analyste. Dans ce transfert, dans le fait de se rendre en analyse de contrôle, d’y évoquer tel ou tel analysant, telle ou telle séance, d’y reprendre un cheminement de début de cure, un accroc, d’y saisir une surdité, il y a quelque chose qui se met à fonctionner permettant de se déprendre de l’angoisse – telle qu’elle peut émerger chez l’écoutant.

Entrelacs
Par Cristina C. BURCKAS   publié le 30 juin 2022

Psychanalyse et Transgenre

Le concept « transgenre » désigne les personnes qui ne s’identifient qu’imparfaitement ou pas du tout avec leur sexe biologique d’origine, souvent ressenti comme une erreur de la nature. Certains transgenres se décrivent exclusivement comme une personne d’un sexe identifié (homme ou femme), d’autres refusent généralement toute forme claire d’assignation sexuelle ou de catégorisation. La désignation est aussi utilisée par les transgenres motivés et engagés politiquement comme terme générique qui se soustrait visiblement à une désignation sexuelle claire (sans ambiguïté). Dans quelle mesure les personnes transgenres souhaitent des interventions médicales permettant une adaptation du sexe par des moyens hormonaux ou chirurgicaux ? Cela dépend de chaque cas particulier.

Entrelacs
Par Martine CHESSARI POREE DU BREUIL   publié le 28 juin 2022

Corps (ensemble de textes)

Chers collègues et amis,

Nous nous étions réunis autour d’un projet d’écriture, grâce à l’impulsion de Francis Hofstein venu nous solliciter avec enthousiasme pour rejoindre un groupe de travail en formation. Nous avons fait corps avec ce projet qui devait mettre la psychanalyse, ses enseignements, au cœur de la création d’un certain discours, comme effet d’une parole constituante.

De balbutiements en trébuchements, d’accords en désaccords, ce projet a bel et bien pris corps. Nous avons écrit dans une certaine adresse et il nous manquait l’accueil d’un lieu de l’Autre pour donner à cette impulsion toute sa portée symbolique, lui permettre un accordage comme effet de résonance et peut-être, un prolongement. À venir.

La Fédération Européenne de Psychanalyse, FEDEPSY, a accepté de se constituer comme lieu tiers pour notre projet en constitution, c’est une portée hautement symbolique, signifiante, qui nous offre désormais un ancrage et donne à notre impulsion toute sa valeur d’acte, à nos écrits une dimension de parole déposée.

Bulletin de liaison
Par Fedepsy  publié le 4 mai 2022

La Lettre de la FEDEPSY - mai 2022

Voici le numéro 8 de la Lettre de la FEDEPSY (mai 2022) Newsletter Fedepsy Mai 2022 Bonne lecture !
Entrelacs
Par Patrick DE NEUTER   publié le 1 avril 2022

Présentation de son livre « Les hommes, leurs amours et leurs sexualités »

D’aucuns, d’aucunes se demanderont peut-être pourquoi j’ai souhaité qu’une reproduction de l’enlèvement d’Europe par Zeus déguisé en Taureau figure en couverture d’un livre consacré aux hommes d’aujourd’hui, à leurs amours, leurs fantasmes et à leurs sexualités.

C’est que le point de départ de cet ouvrage fut une question qui m’a été posée par des chercheuses et des chercheurs, un groupe pluridisciplinaire, qui se réunissait annuellement dans un colloque consacré à ce mythe dans ses diverses occurrences artistiques au cours des siècles.

Associations libres
Par Spyros TSOVILIS   publié le 1 avril 2022

Adèle et le fantassin et Lettre ouverte à Ludmilla Skydra

Adèle et le fantassin

 

Au carrefour du Général Jacques Pâris de Bollardière,
sommeille encore ce matin mon fantassin,
Sur les bouches d’aération du labyrinthe de fer
où il repose
ses os mouillés
par la rosée de l’aube
ses haillons fumants préparent
à petit feu
une bouillie neuve.
Il recevra bientôt c’est l’usage
les hommages des habitants qui ont du cœur
cachet du quartier
de l’eau
et quelques victuailles.

Entre divan et théories
Par Jean-Richard FREYMANN - Moustapha SAFOUAN   publié le 1 mars 2022

À propos de « la formation des analystes » Entretien avec Moustapha Safouan

Jean-Richard Freymann : En 1983, vous avez fait paraître le livre Jacques Lacan et la question de la formation des analystes, en 1988 vous sortez Le transfert et le désir de l’analyste. Est-ce une tentative de réponse à cette question sur la formation des analystes ?

Moustapha Safouan : C’est devenu cela. Mais le point initial était tout à fait subjectif. Après la dissolution de l’EFP, je n’avais qu’une seule tâche en tête, c’était la question de savoir ce que j’avais fait pendant trente ans. J’avais commencé ma pratique en 1950, même fin 1949 ; alors quand cette dissolution a eu lieu, cela a été en quelque sorte l’impératif qui s’est posé pour moi. Puis est venue la mort de Lacan et cela a été aussi un travail de deuil, c’est-à-dire une façon de me détacher correctement de Lacan. On ne se détache pas correctement de Lacan en tombant dans l’imbécillité de confondre ceci avec dire : « le roi est nu », moyennant quoi on ne voit même pas que c’est sa propre nudité que l’on proclame ainsi.

Entre divan et théories
Par Frédérique RIEDLIN   publié le 7 janvier 2022

« Quoi ma Demande, qu’est-ce qu’elle a ma Demande ? »

Echos et prolongements au texte de Martin Roth, « propositions actuelles et inactuelles à l’orée de 2022 »
« Faire écho », donc et plutôt « faire court », aussi. Un « court écho » n’est pas une mince affaire…

Echos

Mais allons-y. Ne serait-ce que pour faire résonner d’emblée cette première formulation « la demande est la partie dicible de la métamorphose d’un désir empêché ». Pas mal, non ? La faire ressortir pour la prolonger et avec elle, ce trait d’un « bien dire », qui soutient le texte de Martin et cette contribution à la transmission de l’expérience analytique, son frayage dans un contexte actuel parfois hostile, souvent encombré, ou comme il le dit, annoncé bouché, fini, incertain. A ce titre, il témoigne là d’une forme de tranquillité sur le devenir de l’analyse en tous les cas, « tant qu’il y aura des analystes » et sans rien perdre de lâcher sur la parure classique de la névrose et de la demande : tant qu’il y aura des analystes en mouvement, capables peut-être de s’assurer à l’inaliénable et au propre de leur champ et de leur objet pour supporter le deuil d’un âge d’or révolu, la nouvelle donne de la transmission, pour se cogner aussi parfois, certains règlements de compte, dévoiements, certains désirs d’effacement ou d’éradication de la psychanalyse dans l’air et les miasmes du temps.

Entre divan et théories
Par Martin ROTH, Valérie RITZENTHALER, Vincent STUTZ, Cyrielle WEISGERBER   publié le 7 janvier 2022

Textes en dialogue : Propositions actuelles et inactuelles à l’orée de 2022…

Un auteur propose un texte à quelques amis, collègues, qui à leur tour écrivent leurs commentaires, questions, réactions.

Il revient à Martin Roth, inventeur de ce format, de l’inaugurer : il choisit une thématique cruciale : qu’en est-il de la psychanalyse aujourd’hui ? Il repère quelques unes des difficultés actuelles mais à ne pas s’arrêter à leurs formes manifestes, ouvre des pistes techniques et éthiques vers des pratiques actuelles ou « actualisées ».
Puis quelques autres lui donnent la réplique, et nous voici en pleine discussion !

Martin Roth :
La psychanalyse résiste au cafouillis social actuel! Dieu est mort, Marx est mort, et la croyance populaire en la science bat de l’aile. On ne sait plus à quel Saint se fier ! La psychanalyse, elle, est souvent décriée, elle est parfois bannie, elle gêne toujours. Et pourtant, elle a de l’avenir. Bon, vous me direz que la tendance indique plutôt tout le contraire. Certes, et c’est précisément ce qui fait de l’approche analytique une ressource ayant de l’avenir. L’atmosphère est saturée, les perspectives sont présentées comme soit bouchées, soit incertaines. Dans les deux cas, l’étau de l’angoisse oppresse le sujet. La perte de sens envahit les esprits, la dépression guette.

Mais le sujet persiste, et le psychanalyste lui tend la perche. Dans le cafouillis ambiant la psychanalyse permet d’exister. Encore faudrait-il que l’analyste sorte parfois de son fauteuil. La demande ne se jette pas toujours sur son divan.

Entre divan et théories
Par Cyrielle WEISGERBER   publié le 7 décembre 2021

Sous influence ?

J’ai entendu par hasard un passage d’une émission de radio évoquant « les risques de dérives sectaires ». Un spécialiste (des dérives sectaires) rappelait qu’un changement repéré chez une personne s’inscrivant dans un nouveau groupe (religieux, associatif, sportif, arts martiaux, etc…) constitue un signal d’alerte, un signe d’influence.
S’entendait une inquiétude face à une menace grave, diffuse : changement (sous-entendu de comportement) = influence = danger.
Quid de la cure psychanalytique, alors, qui n’en est pas une si elle ne produit pas de changement : serait-elle une secte à deux ?!!!
S’entendait en creux l’idée que l’individu pourrait vivre sans influence, devrait vivre sans influence aucune. Lacan la repérait sous le nom de « délire d’autonomie » : le délire de penser qu’un être humain pourrait n’être déterminé que par lui-même, sans influence extérieure de quiconque ni de quoi que ce soit.

Entre divan et théories
Par Jean-Richard FREYMANN, Marcel RITTER, Guillaume RIEDLIN, Cyrielle WEISGERBER   publié le 21 novembre 2021

Dialogue avec Marcel Ritter autour du livre « Amour et Transfert » de Jean-Richard FREYMANN

La présentation a eu lieu le 29 juin 2020 à la Librairie Kléber (et en Facebook live), avec la présence de Jean-Richard Freymann, Marcel Ritter, Guillaume Riedlin et Cyrielle Weisgerber

GR : Bonjour à tous, on est heureux de se retrouver aujourd’hui à la Librairie Kléber pour discuter du dernier livre de Jean-Richard Freymann, Amour et Transfert, préfacé par Marcel Ritter. Je voudrais introduire les choses en commençant par parler du rapport à la transmission parce que nous avons ici deux personnages importants, deux psychanalystes importants, de la scène strasbourgeoise et française qui nous ont transmis ce que eux-mêmes avaient vécu autour de Jacques Lacan, Moustapha Safouan, Lucien Israël et, à travers eux, Sigmund Freud. Ce rapport à l’analyse, j’aime bien utiliser ce mot, c’est l’éthique du sujet, la liberté de chacun d’être au monde. Le discours analytique a parfois souffert à certaines époques où tout était bon à dire sous couvert de psychanalyse. Mais il y des gens qui ont continué à travailler, à remettre en cause la théorie, à amener les choses du côté de la clinique et du travail permanent.

JR : Cette forme de dialogue nous permet de photographier, pour ainsi dire, ce que nous faisons depuis des années. Il y a quelque chose d’important autour de la transmission intergénérationnelle, « ça se poursuit ». « Ça », c’est la question de l’inconscient. L’idée cartésienne est de tout reprendre. On reprend tout à partir de la question : « Qu’est-ce qu’on dirait si on redémarrait ? »

Entre divan et théories
Par Claude Ottmann   publié le 1 juillet 2021

Commentaire du Chapitre V : il faut prendre le désir à la lettre" (Colloque de Royaumont, 1958)

Le premier rapport du colloque international de Royaumont sur « La direction de la cure et les principes de son pouvoir » publié dans La psychanalyse (vol 6, p. 169) en 1961, puis dans les Ecrits en 1966, est donné en cinq chapitres :

  1. Qui analyse aujourd’hui ?
  2. Quelle est la place de l’interprétation ?
  3. Où en est-on avec le transfert ?
  4. Comment agir avec son être
  5. Il faut prendre le désir à la lettre

Jacques Lacan y dénonce les dérives et innovations malheureuses post-freudiennes et préconise un retour à Freud pour, de là, avancer selon ses propres innovations (notamment le rôle du signifiant) en confortant et en généralisant la découverte freudienne sans la dévoyer. Nous proposons ici une lecture du cinquième chapitre, sections une à six.

Entre divan et théories
Par Marc Lévy   publié le 1 juillet 2021

Das Kind ou Du jugement d'attribution et d'existence

Premier long métrage de Wim Wenders, l’angoisse du gardien de but au moment du pénalty.
Revoir ce film après quelques décennies avec un regard différent.
Comme il en sera dans ses créations ultérieures, le climat est particulier, ample vaste, descriptif, proche du nouveau roman ? Un des thèmes abordés qui le sera toujours sur un mode répétitif : la présence de l’enfant.
Nous sommes pris dans un road movie à l’autrichienne ; le co-scénariste Peter Handke y est-il pour quelque chose ? Dérive d’un homme gardien de but international qui de Vienne se retrouvera aux confins d’un pays sur une frontière fermée à tout échange, présence oppressante. Là se sont installés une aubergiste, ancienne maîtresse de notre homme, et son enfant.

Entre divan et théories
Par Matthieu Dollfus   publié le 1 juillet 2021

Passion

Petit essai pour le séminaire de Corpo Freudiano (Paris) du 21 mars 2021

« Le temps de chaque jour est élastique. Les passions que nous ressentons le dilatent, celles que nous inspirons le rétrécissent et l’habitude remplit le reste1. »
                  Marcel Proust, A la recherche du temps perdu

Article « Passion » dans Le champ de dictionnaires

L’étymologie selon Bloch/Warburg (qu’affectionnait tant Lacan)2

Article très court. Cite Saint-Léger (Xe) et surtout Montaigne (1538). Passion au sens de souffrance ; référence à la passion du Christ. Une première fois au XIIIe du latin de basse époque, passio et passionalis « qui a subi une souffrance physique ». Jusqu’au XVIe. Alors que les sens parallèles apparaissent à partir du XVe.

Entre divan et théories
Par Nicolas Janel   publié le 1 juillet 2021

L'« a » cause du désir

De la dernière journée de formation APERTURA qui était sur le thème « violences explicites, violences implicites et intimes violences », je retiens qu’il n’y a pas la violence, mais les violences. Même si on aimerait faire de l’Un en repérant un mécanisme commun sous-jacent aux violences, on tombe plutôt sur une approche davantage « partielisée ».

Ainsi, le registre des violences ne se restreint pas à ce qui est « attentatoire au sujet » pour utiliser les termes de Thierry Vincent. Liliane Goldsztaub nous avait évoqué notamment quelques violences fondamentales qui participent à la constitution du sujet, comme le traumatisme de la naissance1, ou l’agressivité des pulsions qui est première comme nous le rappelait Jean-Richard Freymann à partir de Freud.

Entre divan et théories
Par Marc Lévy   publié le 1 juillet 2021

Une question de fin d'analyse

Ayant pu constater que les fins d’analyse, voire les institutions peuvent être le lieu de dynamiques sociales particulières, je me suis intéressé à ces questions, en particulier à partir du nœud de trèfle et du nœud borroméen. Avec comme autre interrogation subsidiaire : le nœud de trèfle peut-il évoluer en borroméen, et vice versa ?

Mais avant de déplier toutes ces questions, entrons dans la problématique. La topologie lacanienne nous propose deux objets tout à fait particuliers au terme de la démarche topologique : la bouteille de Klein et le cross-cap.

Ces deux objets topologiques ne sont pas identiques mais ils sont porteurs d’une équivalence, un lieu de leur structure ne répond pas aux lois qui régissent l’espace euclidien. Dans la théorisation lacanienne, elles sont le support de présentation d’un concept métapsychologique.

Entre divan et théories
Par Martin Roth   publié le 1 juillet 2021

L'enfance témoigne

La troisième vague est incontestablement psychique. Elle est visible explicitement par une augmentation du nombre et de l’intensité des symptômes, des appels à l’aide et des souffrances de notre jeunesse. Elle est également insidieuse, elle croît comme un sous-courant, invisible et pourtant efficient. Cette transformation silencieuse va tôt ou tard rejoindre la superficie et alimenter le cortège des symptômes. Ces deux manifestations, visible et invisible, dialoguent constamment dans le champ pédopsychiatrique. Les troubles observables entraînent des modifications psychiques qui, à leur tour, influent sur les comportements.

La crise actuelle fait également effet loupe sur l’influence du social sur l’individu. « Une épidémie est un phénomène social avec quelques aspects médicaux » disait R. Virchow, grand médecin du XIXe siècle. Les « psys » pour enfants et adolescents sont témoins de cette souffrance sociale.

Le Psychanalyste et les discours ambiants
Par Eva-Marie Golder   publié le 1 juillet 2021

Le rapport des 1000 jours de septembre 2020

Introduction

Il y a peu de temps, un document gouvernemental est sorti concernant l’accompagnement des familles autour de la naissance et des trois premières années. Une bonne initiative, au demeurant, si ce n’est qu’une fois de plus c’est une commission ad hoc, avec des orientations très précises, et probablement un cahier des charges explicite, qui détermine et préconise des aménagements dont certains, d’ailleurs, ont déjà été adoptés. D’autres pourraient l’être à l’avenir et présagent une mainmise dangereuse sur la vie des familles, tant la volonté de prévenir d’éventuels dangers travesti une véritable surveillance et contrainte inacceptables. Ce n’est pas la première fois que cela se présente, mais on n’entend plus les mêmes protestations que lors du projet GAMIN dans les années 1970 et le rapport de l’INSEE dans les années 2000. Le Covid-19 a certainement détourné le regard sur autre chose de plus urgent. Pourtant, si toutes les préconisations de ce rapport sont appliquées, cela présagerait un contrôle qui n’a plus grand-chose à faire avec la vie dans un État démocratique. Le texte qui suit en fait une analyse.

Le Psychanalyste et les discours ambiants
Par Claire Payen   publié le 1 juillet 2021

c19.info/fr/psy ou Le soutien psychologique 2.0 en temps de pandémie : une révolution en psychiatrie

Introduction

Le 17 mars à 12h le confinement de la population française est ordonné sur l’ensemble du territoire national, suite au discours du Président de la République, Emmanuel Macron, la veille. Il parle de « guerre sanitaire » contre la COVID-19. L’ennemi est un virus, apparu dans l’ombre d’un marché d’animaux vivants à Wuhan (Chine). Il dépasse les frontières, touche nos voisins italiens, s’échappe de la télé et déferle chez nous. Il est d’autant plus dangereux qu’invisible. L’espace Schengen se ferme, tout déplacement restreint au strict nécessaire. Les rassemblements sont interdits, les contacts humains deviennent fatals, le retranchement chez soi, le maître mot. Tous les ingrédients sont réunis pour édifier un climat de pandémie d’allure hypochondriaque. Chacun se demande s’il n’a pas attrapé le coronavirus, craint pour ses proches et ne comprend rien à cette maladie naissante.

Une initiative naît alors, développée par la société Nabla, dont l’équipe est majoritairement constituée d’ingénieurs et de médecins, engagés dans la transformation de la pratique médicale, grâce à l’intelligence artificielle (IA). Plus précisément, il s’agit d’un site : c19.info, sous la direction médicale du docteur Anne-Laure Rousseau, médecin vasculaire, avec l’aide du docteur Stanislas Harent, infectiologue.

TEMOIGNAGES DE DECONFINEMENT - RECONFINEMENT
Par Matthieu Dollfus   publié le 19 novembre 2020

Le masque, la muselière et le voile

Sophocle écrit Œdipe dix ans après la peste d’Athènes. Son héros naît après une épidémie et va au-devant de sa tragédie sans savoir de quoi il retourne pour lui. Les oracles auront beau avoir annoncé quoi que ce soit, il ne peut comprendre quelque chose que dans l’après-coup, lorsqu’il a traversé les épreuves de sa destinée. C’est dans l’après-coup de sa rencontre avec son père et sa mère, selon son heure, qu’il réalise l’horreur et adhère à sa malédiction, au point de s’aveugler.

Shakespeare écrit Hamlet également dans un contexte de déliquescence d’un royaume. Son héros va au-devant de sa tragédie en sachant dès le départ de quoi elle est faite. Il rencontre le spectre de son père dont il apprend, dans le même temps, qu’il est mort, qui l’a tué et ce qu’il doit faire pour laver ce crime. Hamlet s’avance vers l’accomplissement de la vengeance qu’il doit relever en reculant, toujours en décalage avec son heure. C’est l’heure des autres et des événements qui le feront basculer in extremis dans l’acte qu’il doit accomplir et la mort. Il mesure dès le début l’implacable arrêt du destin. C’est la grande différence avec Œdipe1. Mais les deux sont encore dans la scène. Y sommes-nous toujours ?

NOUVEAU CABINET DE LECTURE
Par Claude Ottmann   publié le 19 novembre 2020

Jacques Lacan, La direction de la cure et les principes de son pouvoir (Rapport du colloque de Royaumont)

Le premier rapport du colloque international de Royaumont sur « La direction de la cure et les principes de son pouvoir » publié dans La psychanalyse (vol 6, p 169) en 1961, puis dans les Ecrits en 1966, traite les questions suivantes :

  1. Qui analyse aujourd’hui ?
  2. Quelle est la place de l’interprétation ?
  3. Où en est-on avec le transfert ?
  4. Comment agir avec son être ? et se conclut par
  5. Il faut prendre le désir à la lettre

Lacan y dénonce les dérives et innovations malheureuses post-freudiennes et préconise un retour à Freud pour, de là, avancer selon ses propres innovations (notamment le rôle du signifiant) en confortant et généralisant la découverte freudienne sans la dévoyer. Nous proposons ici une lecture du second chapitre.

HOMMAGE A MOUSTAPHA SAFOUAN
Par Jean-Louis Doucet-Carrière   publié le 19 novembre 2020

Les fourberies de la raison

« Rien n’est plus fort qu’une opinion que l’on a subie, qu’on a voulu nous imposer, que nous avons déchirée et rejetée et à laquelle nous revenons enfin par la contrainte de notre pensée, des événements et des expériences, et non plus sous la figure de quelqu’un, et avec un son de voix qui nous irrite. Nous croyons à nous-même. »
                    Paul Valéry1

Dans son texte « L’avenir d’une illusion » Freud nous assène cette formule : « Il n’y a pas d’instance au-dessus de la raison. »
On sait que Goya quant à lui soutenait que « le sommeil de la raison engendre des monstres ».

Quelle est donc cette raison qui, pour ces deux génies, représenterait ce qu’il y a de plus élevé et de plus fondamental chez le vivant humain. C’est donc, si je puis dire, une bonne raison de préciser ce que l’on entend derrière ce qui se dit lorsqu’on parle de raison !

Entre divan et théories
Par Jean-Louis DOUCET-CARRIERE   publié le 8 août 2020

Malaise dans l’énonciation ?

« Parce que l’acte fondamental de la parole est l’acte par lequel le sujet doit pouvoir faire acte de présence au point traumatique où l’Autre s’avère absent. » Alain Didier-Weill1

« Encore, c’est le nom propre de cette faille d’où dans l’Autre part la demande d’amour. » Jacques Lacan2

Je vous dois un avertissement en préambule à cette réflexion, c’est qu’elle va être souvent hors-sujet à tous les sens de cette formule ! Je pense qu’il a bien été souligné ici que, après des décennies d’une nosologie psychiatrique articulée autour du triptyque « Névrose, Psychose et Perversion », les nouvelles classifications établies par les DSM successifs nous laissent désarmés quant à une approche de la souffrance psychique selon le rapport que celle-ci entretient avec le réel.

Entre divan et théories
Par Eva-Marie Golder   publié le 4 août 2020

Mon bébé est au téléphone : Petite histoire d’une grande solitude ou le mythe de l’autonomie de l’individu

Cela commence bien avec une remarque d’un père qui me dit à propos de sa fille de cinq mois :
« Le soir, je l’endors en la berçant.
Je lui demande pourquoi il fait ça.
– Parce qu’elle ne s’endort pas autrement.
– Avez-vous essayé ?
– Oui, et alors elle pleure. »

Il s’engage alors tout un échange sur le sommeil : le sommeil est-il à elle ou à lui ? Il n’avait jamais pensé la chose ainsi. Je lui fais remarquer qu’en effet, après cinq mois de ce traitement, sa fille avait sûrement du mal à comprendre qu’elle pouvait en faire son affaire toute seule. Il me parle de son désarroi devant ces pleurs. Sensible, il accepte tout à fait l’idée qu’il peut progressivement remplacer le bercement par des berceuses qu’il lui chante ; je lui explique l’intérêt de ce relais. En effet, s’il continue de la bercer, il aura toutes les chances de devoir continuer longtemps, voire de retrouver sa fille dans le lit conjugal pour enfin pouvoir dormir, lui et sa femme, collés de corps à corps avec leur enfant. Et encore… Je souligne que ça ne se termine pas toujours très bien.

Entre divan et théories
Par Martin Roth   publié le 4 août 2020

Le temps de conclure

Ce texte s’inscrit dans la continuité des élaborations proposées jusqu’alors. Les événements autour du Covid-19 ont été l’occasion de préciser certains points cliniques. Cette période a été féconde : qu’est-ce qui s’est révélé à vous ? Qu’est-ce qui s’est révélé de vous ? Ces questions qui interpellent le singulier – c’est notre champ premier de travail – peuvent s’étendre au collectif. Nous ne cessons d’être à l’interface du solitaire et du solidaire telle que l’énonce avec force Camus dans le Discours de Suède, à l’occasion de la réception du prix Nobel : solitaire mais solidaire mais solitaire mais solidaire mais etc. D’autre part, ces points cliniques ne sont ni totalement actuels ni entièrement inactuels. La psychanalyse ne peut pas être précipitée par une actualité qui empêche la réflexion. La réflexion implique une dimension temporelle, une durée au sens bergsonien, c’est-à-dire une continuité-discontinuité, une élaboration rythmée par une scansion. Sans coupure il n’y a pas de retour réflexif possible.

Entre divan et théories
Par Cyrielle Weisgerber   publié le 4 août 2020

Écouter l'autre dire qu'il va mal ?...

Quel étrange métier nous faisons, à faire cela!… Pourquoi nous « enquiquinons-nous » ainsi ?…
Il y a un point-pivot à cet endroit, précisément, autour d’écouter l’autre dire qu’il va mal.

Parce qu’il y a différentes façons de parler de ses souffrances – son mal à être –, et différentes façons d’écouter l’autre parler de ses souffrances – son mal à être.

Je vais me concentrer sur les « façons » qui nous concernent, dans la pratique de l’analyse et de la psychothérapie. Et sur le point-pivot, l’endroit qui permet de franchir un cap et de passer d’une façon de parler-écouter à une autre façon de parler-écouter.

MYTHE INDIVIDUEL DU NÉVROSÉ
Par Jean-Richard Freymann   publié le 28 mai 2020

Et si l’on cherchait un mythe fondateur de J. Lacan ?

I – Loi du retournement : mythe – fantasme chez Lacan

L’intérêt d’écrire d’une semaine à l’autre est que le fil métonymique se dessine tout seul ; il suffit d’attendre les productions de sa propre imagerie, ses propres fantasmes le concernant.

À propos du « fil personnel », je me suis rendu compte que je n’ai jamais interrompu le dialogue avec ceux qui ont poursuivi les échanges avec moi, qu’ils aient été amis, ennemis, complices, élèves, maîtres… Cela a sans doute à faire avec quelque fantasme d’immortalité. Mais je persiste à penser que quelqu’un qui se prétend psychanalyste et qui refuse de dialoguer – même de manière véhémente – cela est sans intérêt.

Dans cette idée, j’ai dû produire quelques identifications avec des maîtres et je pense en particulier à la personne de Jean Clavreul et aussi de Jacques Lacan. Je ne fais pas allusion ici à Lucien Israël, où la recette était plus compliquée, avec entre nous quelques maîtres talmudiques et de la culture littéraire commune.

ÉCHOS À L'ACTUEL
Par Pierre-Édouard Blondel   publié le 21 mai 2020

« Voir sa colère Pr Otto ! »

« Au secret de l’action du politique : le bon logicien, odieux au monde ».
J. Lacan, Le temps logique et l’assertion de certitude anticipée, 1945.

Cette nouvelle éphéméride veut faire écho à différentes propositions antérieures : l’apparente débilité comme trace fondamentale du déni (merci Guillaume pour cette jolie formule) dont il nous semble important de questionner la dimension collective, et la mise en question par Cyrielle de notre rapport au savoir dans la clinique, que nous souhaitons faire résonner avec le spectre d’un savoir scientifique et absolu qui nous surplombe de manière encore plus aiguë en cette période de crise. La question de l’articulation entre singulier et collectif que j’ai trouvée particulièrement prégnante dans le texte de Martin des Éphémérides 3 est également en filigrane de cette réflexion.

CLINIQUE DU COVID 19
Par Jean-Richard Freymann   publié le 14 mai 2020

Le déconfinement ou « La clinique est pleine de surprise ! »

  1. « Surprises du déconfinement »

Autant le confinement prolongé a provoqué des manifestations de lassitude et d’agressivité, autant le retour vers le « déconfinement » replonge vers les ressorts de l’angoisse.

Quels sont ces paradoxes ?

L’humain s’habitue à presque tout, sauf à l’irruption du changement. L’être parlant se ritualise dans des aberrations dont il perd souvent les raisons. Essayez chez vos proches de toucher à leurs petites habitudes, vous m’en direz des nouvelles !

La question freudienne (modèle 2e topique) serait de se demander s’il s’agit là de la mise en jeu de « l’automatisme de répétition » ou « des pulsions d’auto-conservation » ? Freud en donne plusieurs réponses dans un texte intitulé « Au-delà du principe de plaisir1 ». En termes lacaniens on pourrait risquer : Comment se priver des jouissances de la répétition ? J’ai eu quelques surprises concernant les modifications des édifices techniques de ma pratique de l’inconscient. En fixant une date – avec quelque fierté ! – de reprise des consultations « présentielles », grande a été ma surprise en entendant quelques patients me dire qu’ils préféreraient poursuivre en « téléconsultation ». Surprise ? Et pourtant Marcel Ritter et Cyrielle Weisgerber nous ont bien montré les fonctions de la présence dans les précédents « Éphémérides ». Je dirais plutôt que la plupart des gens ne supportent pas l’anticipation du changement, même si par la suite les choses se passent fort bien.

CLINIQUE DU COVID 19
Par Jean-Louis Doucet-Carriere   publié le 14 mai 2020

L’amour au temps du Corona

L’idée de ces quelques mots m’est venue de l’observation « distante » des gestes barrières conseillés, voire imposés dans ce temps critique même s’il peut nous apparaître tout autant comme un temps logique !

La relecture non fortuite de l’ouvrage de Jean-Luc Nancy : Noli me tangere m’a incité à mettre cette idée sur le papier.

Se masquer, garder ses distances, ne pas se toucher, prendre des gants.

Comment ne pas évoquer devant ces masques, le plus souvent identiques entre eux, une uniformisation des visages ? Il ne s’agit plus là en effet de la persona – ce masque que portaient les acteurs dans le théâtre antique qui, d’une part, donnait à l’acteur l’apparence du personnage qu’il interprétait et, d’autre part, avait pour but de porter la voix au plus loin – en effet, nos masques chirurgicaux ou FFP2 donnent à tous et à chacun le même aspect d’extra-terrestre muselé. Heureusement, même si le port de lunettes paraît tout aussi indispensable, celui-ci permet toujours de percevoir le regard de nos congénères, sauf bien sûr à se réfugier derrière des lunettes teintées !

ÉCHOS À L’ACTUEL
Par Claudine Hunault   publié le 14 mai 2020

Sortir du confinement – pour quoi faire ?

Un changement s’est produit dans la parole des patients. Je situe ce changement dans le sillage des annonces du Premier Ministre le 19 avril. Durant les premières semaines de confinement, s’exprimait une anxiété qui portait sur des questions personnelles (occuper son temps, vivre seul(e) ou à temps plein avec l’autre, avec les enfants, supporter les annulations des échéances professionnelles…). Certains disaient se vider de leur substance en l’absence de l’autre, se vivant d’abord comme partie d’un ensemble et perdant le sentiment d’une existence propre si cet ensemble disparaissait physiquement de leur paysage. Cet « ensemble » avait habituellement une fonction de tiers qui soutenait chaque jour le désir de se lever, de se porter au dehors et d’agir. Il avait aussi une fonction de tiers pour le couple confiné où commençait à s’émousser le goût de l’autre. La tension amoureuse se raréfiait si autrui n’était plus là pour la percevoir et la reconnaître.

LECTURE de das Ding
Par Marc Lévy   publié le 7 mai 2020

Vase bouquet cross cap et phallus, d'une psychogenèse. Le sourire de mon père

D’un point de vue métapsychologique, c’est une question de pot et de fleurs, si l’on file le schéma optique.

Le pot du corps, et les fleurs des pulsions partielles.

La pratique du thérapeute est de permettre de reconnaître ces pulsions partielles, (au moins les plus bruyantes), de ramener les pulsions partielles vers le moi, voire activer la métaphore paternelle qui noue idéalement les pulsions partielles au corps par une loi symbolique ; mais tel est l’idéal théorique.

Or pour Freud la pulsion émerge entre psyché et soma ; qu’en est-il du soma ?

 

ÉCHOS À L’ACTUEL
Par Martin Roth   publié le 7 mai 2020

Sous-mission

Que se passe-t-il quand le discours ambiant répond à une injonction dominante ? Quels effets sont repérables lorsqu’une uniformisation des discours diffuse subrepticement ? J’esquisserai une réponse parmi d’autres. Pour cela, je tente de maintenir le fil tiré jusque-là, celui de la sidération. Décidément le terme prête encore à confusion : il ne s’agit ni de peur, ni d’effroi, ni de traumatisme collectif. La sidération peut se manifester par de la peur, de l’effroi, ou un traumatisme de société1. Mais elle n’est pas ces phénomènes, elle relève d’une dynamique psychique. Éventuellement la conception proposée résonne avec le traumatisme freudien. Elle n’est pas uniquement passivité mais contient en germe l’activité. Exception faite des situations où elle entraîne la mort, elle génère un changement d’état. Elle est donc plus proche du devenir que de l’être.

Associations libres
Par Benjamin LEVY   publié le 3 mai 2020

À la vitesse de la lumière, ou Jacques Lacan paranoïaque

Voilà bien des années, j’ai déclaré à mon analyste d’alors que, dans la théorie de la relativité d’Einstein, la vitesse de la lumière joue le rôle de Nom-du-Père.
Il me semble que ni lui ni moi n’avions alors eu envie de comprendre à quel point j’avais raison.

De quoi était-il question ?

Entre divan et théories
Par Jean-Richard Freymann   publié le 30 avril 2020

Pour une nouvelle Mythologie – Gare au confinement

Cette affaire d’épidémie renvoie à une sorte d’arbitraire du réel, où chaque jour chacun peut s’interroger : Vais-je aujourd’hui quitter le navire de la vie ? Ai-je serré les mauvaises mains ? Ai-je pris le souffle (non pas du divin) mais du malheur ? Vais-je rencontrer l’enfant qui va m’épidémiser ? Y aura-t-il de la place pour me réanimer ? Serai-je entouré par ma famille confinée ? Et ciel ! À quel moment le nuage de la « maladie » et de la mort va-t-il s’éloigner ? Va-t-on m’oublier eu passage ?

J’ai eu la chance pour l’instant de pouvoir consulter par téléphone, d’utiliser WhatsApp, Skype, d’échanger avec des amis et j’ai été frappé par le pouvoir du téléphone, par cet amour d’un « Dire » qui vient nous rappeler que vous êtes encore en vie.

Mais quoi qu’il en soit l’amitié vient à garder une portée considérable. L’idée de solitude vient à reprendre une grande importance dans un mélange terrorisé de craintes et de méditation.

Entre divan et théories
Par Cyrielle Weisgerber   publié le 30 avril 2020

Réflexions autour d’un « savoir clinique » – suite

« Savoir clinique », « savoir sur la clinique », « savoir entendre la clinique » ?… comment faudrait-il dire ?
Quelque chose a à voir avec du savoir, dans le rapport à la clinique. Et ne s’y résume pas. Je proposais la semaine passée : « entre poésie et savoir ? »1

Si je m’avance un peu du côté du savoir, malgré toutes les précautions qu’il me faut prendre de ce côté-là – attention ! le savoir peut se transformer en discours sclérosé sclérosant, pétrifié pétrifiant….
Si je m’avance un peu, au bord du précipice, que pourrais-je en dire ?…
Il y a du savoir-entendre, du « savoir-permettre-de-parler » aussi, de la technè. C’est toute une affaire, que d’accéder à la possibilité de parler et n’être pas seulement le jouet des discours, et jusqu’au jouet de sa propre parole.

ÉCHOS À L’ACTUEL
Par Yves Dechristé   publié le 30 avril 2020

Au quarantième jour

Nous voilà au quarantième jour du confinement ! Quarante jours qui résonnent avec les 40 jours de jeûne du Christ dans le désert au cours desquels le diable vient le tenter mais il résiste. Un parallèle est fait dans le catéchisme de l’église catholique entre la tentation du christ, celle d’Adam, et le livre de l’exode dans lequel les hébreux voyagent pendant 40 ans dans le désert après avoir traversé la mer Rouge avant d’atteindre la terre promise. Le nombre de quarante jours est également la durée du Déluge pendant lequel l’arche de Noé flotte sur les eaux dans le livre de la genèse. Ou encore les quarantièmes rugissants, ces grands vents de l’hémisphère sud que doivent affronter les voiliers dans le Vendée Globe. Quarante jours d’épreuves à affronter avant d’accéder à un moment plus favorable, plus paisible, à la liberté !

 

ÉCHOS À L’ACTUEL
Par Martin Roth   publié le 30 avril 2020

Détours de la sidération

La névrose résiste au temps moderne

La névrose n’est toujours pas morte. Elle ne se tait pas. Peut-être faut-il tendre l’oreille pour entendre ses méandres discursifs, mais ceux-ci persistent. Les modifications plus ou moins bruyantes, plus ou moins insidieuses, des discours alentours donnent de nouvelles formes expressives aux conflits névrotiques. Mais elles ne les anéantissent pas. Elles les empêchent, ça oui ! C’est même leur objectif. Étouffez les bruits des pulsions ! Taisez la voix surmoïque qui pousse à jouir ! Détruisez la moindre manifestation du si subversif désir ! Le discours ambiant cherche la normativité, le conforme, le confiné à la statistique commune. Lisez Le conformiste de Moravia pour voir d’où peut provenir et où peut mener l’exigence d’être conforme. Le discours ambiant tente d’astreindre le moi à une seule voie possible. Réminiscence illusoire d’une image partagée. En cela ce discours véhicule une certaine morale éducative aux échos d’autorité. Recette classique pour asseoir un pouvoir. La névrose est bien là pour rappeler l’échec de cette tentative. L’insurrection névrotique dénonce le lieu de la répression.

Entre divan et théories
Par Cyrielle Weisgerber   publié le 22 avril 2020

Improvisation libre – et préliminaire – sur un « savoir clinique »

Mon rapport au savoir n’a jamais été simple. Très bonne élève longtemps – celle qui sait dire au prof ce qu’il veut entendre… – lorsque cela a lâché, cela (une analyse a quelques effets), lorsque cela a lâché j’ai été bien empêtrée face à la question du savoir.

Empêtrée doublement – dans le champ analytique le savoir n’est pas révéré, mais questionné, reconnu et mis à distance dans son versant de connaissance paranoïaque (au fond c’est un délire que de croire savoir), déjoué sur son versant de prise de pouvoir, jouissance indue, articulé sous forme de « savoir-faire », technique plutôt que science (technè, artisanat, art…).

Il y a quelques jours, après la première consultation d’un jeune homme, je me disais pourtant que nous nous soutenons d’un certain savoir, un savoir sur la clinique, un savoir entendre la clinique. Un « savoir-entendre » qui se construirait comme un savoir-faire, qui se construirait à travers la pratique – doublée de l’étude et de la transmission.

ÉCHOS À L’ACTUEL
Par Jean-Richard Freymann   publié le 22 avril 2020

« Frères humains qui… aujourd’hui vivez… »

Avez-vous remarqué l’effet d’annonce de la date pour la levée du « confinement » ? Pour l’instant l’on oscille entre des rêves de liberté retrouvée et un mélange de craintes concernant le fait de savoir de quel groupe d’« affranchis » nous allons faire partie.

Quoi qu’on en dise un peu partout, on sait peu de choses sur le Covid 19 et malgré les nouvelles rassurantes des réanimateurs on voit défiler statistiquement le nombre des morts.

Que l’être humain est solide !… à supporter un chiffrage contradictoire et à attendre les autorisations pour vivre dans une réalité habituelle.

À PROPOS DU CONFINEMENT
Par Cyrielle Weisgerber   publié le 7 avril 2020

La psychanalyse au temps du "corona"

Le titre est trop tentant, je ne résiste pas.
Depuis quelques semaines déjà tourne dans ma tête l’expression « la peste au temps du choléra » : je me rappelle, crois me rappeler, viens de vérifier que c’est complètement erroné, décalé, mais je vais vous dire d’abord ce que je croyais me rappeler. Crois me rappeler donc que cela doit être le titre d’un livre de Gabriel Garcia Marquez (j’ai tant aimé lire, à vingt ans, Cent ans de solitude1 !) ; je suppose qu’il y a une certaine ironie, « la peste au temps du choléra », le pire lorsqu’il y a déjà le « mal » ?
Alors ces mots tournent dans ma tête, et l’envie d’écrire quelque chose sur la pratique de la psychanalyse, la tentative de poursuite de la pratique de la psychanalyse, en ces temps perturbés (nous sommes aujourd’hui le 18 mars 2020).

À PROPOS DU CONFINEMENT
Par Marcel Ritter   publié le 7 avril 2020

En ce temps de confinement

Quelques remarques, en vrac, à propos de la pratique de l’analyse en ce temps de confinement.

Les prises de position sont variables. Certains ont fermé leur cabinet jusqu’à nouvel ordre. D’autres continuent de recevoir des analysants, mais dans le strict respect des recommandations concernant « les barrières ». D’autres encore ont opté pour la pratique des séances par le moyen de la vidéo ou par le téléphone.

Notons que lors des séances par vidéo, l’image du corps de l’autre est présente, autant celle de l’analysant que celle de l’analyste, alors que le corps réel est absent. Et lors des séances par téléphone, le corps de l’autre est absent en permanence, autant sur le plan de l’image que sur celui du réel.

La question se pose de savoir quelles peuvent être les conséquences de ces changements, certes temporaires, au niveau du transfert, mais aussi au niveau de l’écoute de l’analyste.

Le Psychanalyste et les discours ambiants
Par Yves DECHRISTE   publié le 8 février 2020

Psychanalyse et politique

« À l’heure où les discours des politiques se réduisent à des slogans, favorisant les effets de suggestion et de déni du psychique, l’entreprise analytique soutenue par le désir de l’analyste trouve toute sa place. »

L’idée d’interroger les liens entre psychanalyse et politique était loin de mes interrogations sur ma pratique. Elle est apparue peu à peu pour devenir plus insistante à la suite de la rencontre avec une journaliste souhaitant avoir l’avis d’un « psy » concernant le rapport d’information enregistré à la Présidence de l’Assemblée Nationale le 18 septembre 2019 sur l’état de la psychiatrie en France. Le fait que les termes de psychanalyse ou d’inconscient n’ont été à aucun moment mentionnés dans ce rapport a encore accentué ma curiosité. Ce rapport qui m’est tombé en quelque sorte sous la main, suivi d’un autre, une tribune parue dans le Nouvel Observateur, « Pourquoi les psychanalystes doivent être exclus des tribunaux », suscitent spontanément il est vrai un mouvement de rejet méprisant ou des affects de colère, avec elle le rejet de la politique tout court qui ne serait que pouvoir administratif, technique de la vie collective. C’est la rencontre fortuite de textes au même moment, qui ont été pour moi l’occasion d’avancer sur la place de la politique dans la formation du sujet.

Entre divan et théories
Par Nicole LEVY   publié le 9 juin 2019

Les premiers entretiens avec le psychanalyste et leurs impacts dans le déroulement de la cure

Je me souviens d’un jeune psychiatre dont les premiers mots furent : « Si je viens chez vous, c’est parce que je pense que vous êtes juive, ou tout au moins votre mari et cela fera enrager mon père qui est un profond antisémite. »

Dans ce même registre, un autre médecin ayant déjà fait un malencontreux parcours avec une Madame Tartempion : « Avec vous j’ai de l’espoir : Lévy, c’est comme Freud. »

Je fus immédiatement frappée par l’incidence, l’importance du nom, du prénom aussi.

Entre divan et théories
Par Marie-Thérèse SCHMITT   publié le 1 mars 2017

Clinique différentielle - Deuil et mélancolie

Liminaire

Cet article s’inscrit dans mon précédent cursus universitaire (master 2 mention psychanalyse) à l’Université de Montpellier, validant l’unité d’enseignement intitulée « Éthique du sujet et objet du manque ».
Ce qui va suivre concerne un fragment de texte extrait de l’ouvrage freudien « Deuil et mélancolie ».

Le Psychanalyste et les discours ambiants
Par Patrick LANDMAN   publié le 28 janvier 2017

La psychanalyse est morte pour les autismes

La psychanalyse est morte pour les autismes, vive la psychanalyse pour les autismes !

Dire que la psychanalyse est morte pour les autismes est une affirmation qui repose sur plusieurs faits concordants :

Tout d’abord après les décennies soixante-soixante-dix du siècle dernier qui avaient vu la domination exclusive ou presque des théories psychanalytiques dans le champ de la pédopsychiatrie, les trente années qui ont suivi ont été l’occasion d’un changement de paradigmes au profit des théories neuro-scientifiques et des orientations comportementalistes. Tous les acquis exceptionnels apportés par la psychanalyse comme la finesse des observations cliniques, la subtilité des modèles descriptifs et des hypothèses sur le fonctionnement psychique en particulier les mécanismes de défense des personnes autistes comme l’identification adhésive ont été en quelque sorte balayés par la perspective nouvelle à orientation neuro-scientifique.

Entre divan et théories
Par Patrick DELAROCHE   publié le 11 octobre 2016

Le silence du psychanalyste

Imposé à Freud par une patiente hystérique, le silence du psychanalyste fait désormais partie de la technique de base de l’analyse avec l’attention flottante et l’association libre. Le silence réclamé par Emmy von M. pour expliquer ses symptômes sans que Freud ne la harcèle de questions inaugure l’importance de la parole du patient et même le fait que c’est sa parole qui va faire office d’interprétation, c’est-à-dire remonter à l’origine des traumatismes, des non-dits et des malentendus pathogènes. Malheureusement cet idéal subit souvent des revers divers.

Entre divan et théories
Par Jean-Louis DOUCET-CARRIERE   publié le 8 septembre 2016

Du cri à l'écrit : le désir de l'analyste en question

« La mort dans un cri et l’enfant dans la vie », c’est le dernier vers du poème de Jacques Prévert : « Premier jour » où avec tout son génie il décrit la mort en couche d’une jeune femme et la venue au monde de son enfant. J’ai, l’année dernière, été bouleversé par la représentation de la pièce de Fédérico Garcia Lorca :  »Noces de sang »où ce dernier martèle à plusieurs reprises la problématique qui est celle de  »La recherche de la racine obscure des cris ».

C’est à partir de là que j’oserais aborder la problématique du désir de l’analyste.

Entre divan et théories
Par Martine CHESSARI POREE DU BREUIL   publié le 17 mars 2016

Conditions, fondements et enjeux de l'Amour dans la conceptualisation de François Perrier

À l’autre, dans son rapport à l’Autre chose de l’amour

« L’amour est toujours exilé comme le terme qui justement ne rendra pas compte de ce dont il s’agit. » François Perrier, Séminaire 1970-1971, L’Amour

Cabinet de lecture
Par Guillaume RIEDLIN   publié le 16 mars 2016

Cannibalisme, oralité et sexualité

Relecture du numéro 6 (1972) de la Nouvelle revue de psychanalyse « Destins du cannibalisme » 1

Cannibalisme : action ou habitude pour les hommes ou les animaux de manger des êtres de leur propre espèce. (Dictionnaire Larousse en ligne)

D’un point de vue sociologique, le cannibalisme apparaît comme loin de nous, culturellement primitif peut-être même. Pourtant des traces de cannibalisme subsistent : l’anthropophagie comme moyen de survie, le fait d’avaler des liquides d’origine corporelle, l’anthropophagie criminelle, mais et surtout dans le discours sous forme de mythe, conte et trace. Le lien du cannibalisme avec l’oralité est évident dans sa forme d’incorporation, mais à travers cela, exprime quelque chose de la sexualité. Dans le numéro 6 de la Nouvelle revue de psychanalyse datant de 1972 et s’intitulant : « Destins du cannibalisme » plusieurs textes pourront servir de point de départ à une réflexion que nous amènerons sur le terrain du signifiant et de ce qu’il représente.

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