Est-ce que cela vaut vraiment la peine que je me mette à écrire des éditoriaux ou quelques livres destinés à des salons du livre ou à des amis collègues qui souvent ne sont en rien objectifs ?
Je suis obsédé à ce sujet par Morvan Lebesque[1] où, chaque semaine, j’attendais la nouvelle édition du journal satirique « Le canard enchaîné ». Il va falloir que je m’y remette.
J’étais en vacances dans le sud avec mes parents… 15 ans à l’époque… et mon paternel avait reconnu Robert Treno[2], le directeur de la publication du Canard enchaîné. Je lisais « Les chroniques du Canard Enchaîné »[3] de Morvan Lebesque et dans ma candeur (de l’époque) je voulais obtenir un autographe dudit Treno, sur le livre de Lebesque. Treno repousse cette proposition en me disant : « j’aurais bien aimé, mais c’est impossible »… Pas de falsification… Eh oui on ne mélange pas « les torchons et les serviettes » ou « je ne le mérite pas » ou « comment confondre « une énonciation avec l’autre ».
Pour moi ce serait plutôt comment parvenir à un Panthéon des Écrivains ? J’en ai tout autant pour Arthur Rimbaud, Franz Kafka, Serge Leclaire et à certaines tranches de Jacques Lacan et de Lucien Israël. Je m’arrête là pour aujourd’hui. Et je vois que Cyrielle, Martin, Guillaume s’en approchent. Comment rêver d’une écriture qui persiste ? Mais de quoi s’agit-il ? Et quel rapport avec le champ analytique ?
Je me rappelle des injonctions de Lucien Israël, pourtant un grand spécialiste de l’oralité, s’écriant à propos d’un texte sur la conversion psychosomatique : « Remets-toi mille fois sur le chantier ». Lucien Israël ne voulait pas que l’on confonde rsi (en minuscules) avec RSI (en majuscules) : les signifiants quoi !
Pour écrire il faut à la fois respecter les maîtres et à la fois leur avoir échappé.
Alors, « l’écriture du rêve Schibboleth de la cure analytique » ? Voici un condensé dont il va falloir que je me justifie.
L’écriture est à la fois un Einfall et une élaboration synthétique. Pourtant l’écriture dont je parle est la production de la corne de Roland de Roncevaux. Proche du cri, d’une énonciation pure, ni symptôme, ni sinthome. Une certaine musicalité du désir, une approche ultime dans l’adresse.
Alors cette écriture touche plus l’analysé que l’analysant. Le participe présent secoue le participe passé. Qu’y a-t-il entre le présent et le passé ? Un temps rétroactif.
« Je lui arracherai les yeux »[4]
« Yeux vidés auxquels il manque le regard »[5]
« Un couteau sans manche auquel il manque la lame »
« Frères humains qui après nous vivez... »[6]
…
Un écrit peut-il être testamentaire dans le sens de la transmission et non notarié ? En se rapprochant du testamentaire on quitte la dimension analytique qui doit flotter sans objet. Tenter d'un parler vrai, sans que pourtant l’on soit garanti de la compréhensibilité de sa parole.
« Ce que tu as hérité de ton père, habite le »
Ces approches manquent de simplification, nous devrions tomber sur une écriture de type « famillionnaire ».
« Motus et bouche cousue »
Où l’inconscient retrouve ses droits.
« L’inconscient est la trace de ce qui opère pour la constitution du sujet » (cf. texte de la déclaration).
Question : En fétichisant le CON-TEXTE n’a-t-on pas perdu le TEXTE HIEROGLYPHIQUE ?
« Ça rêve de ne pas se comprendre ».
NB : Vous n’avez pas fini de supporter mes éditoriaux qui gardent une couleur onirique.
- Morvan Lebesque, 1911-1970, journaliste et essayiste. ↑
- Robert Treno, 1902-1969, journaliste, rédacteur en chef du Canard Enchaîné de 1953 à 1969. ↑
- M. Lebesque, Les Chroniques du Canard Enchaîné, Paris, Diffusion A. Colin, 1983. ↑
- J. Lacan, « Motifs du crime paranoïaque : Le crime des sœurs Papin », in De la psychose paranoïaque dans ses rapports avec la personnalité suivi de Premiers écrits sur la paranoïa, Paris, Seuil, 1975. ↑
- P. Süskind, Le pigeon, Paris, Fayard, 18 mars 1987, ↑
- F. Villon, La ballade des pendus, 1462. ↑