Le psychanalyste fait une offre déroutante à l’individu moderne : un cheminement singulier contre vents et marées… Contre les attentes familiales et contre les attentes sociétales... L’analysant creuse un sillon plus proche de son désir. Chaque époque conditionne des attentes, des demandes, des pensées et des impensés ! Conditionnement véhiculé par les discours ambiants… et leurs soubassements ! L’individu y est aliéné, mais le sujet s’en décolle en parlant à un analyste.
L’analysant sort du carcan environnant et s’autorise une voix propre. Prenons l’exemple du temps et du rapport à la temporalité. La déroute que rencontre le sujet qui s’ose à la parole est de nos jours d’autant plus intense que nous sommes conditionnés socialement par la vitesse, l’immédiateté, la précipitation. Car la temporalité, ou plutôt les temporalités qu’ouvrent la cure, dénotent avec les temporalités modernes. Entre l’atemporalité de l’inconscient et la précipitation quotidienne, l’exigence d’immédiateté, la connexion constante (téléphone, mail..), il y a un gap qui se creuse de plus en plus.
La frustration naît de ce gap entre une demande ressentie comme besoin, car présentée comme telle par la société et son impossible satisfaction. Ceci pousse l’analyste à repenser la temporalité dans sa pratique. Une ouverture possible du patient vers l’analysant dépend justement en partie de l’art de l’analyste à faire avec des temporalités différentes. L’accroche ou non de certains patients qui viennent vous voir, dépend de votre conception du temps en analyse !
« Qu’est-ce que la psychanalyse aujourd’hui? », entendis-je lancé lors d’une réunion FEDEPSY. Ah voilà une question passionnante qui doit nous pousser au travail ! Les séminaires, cartels, conférences, congrès, etc. sont autant de lieux qui « perlaborent » ce point. Les textes fondamentaux y sont repris. Ils sont réinterprétés au regard de nos pratiques actuelles. Donc, inévitablement, au regard du monde dans lequel nous vivons. Quels sont pour vous les fondamentaux, les invariants, de la psychanalyse ? Et quelles variations inévitables notre société forcent à penser, à pratiquer ?
Je vous donne un tuyau : votre cure, et celles de vos patients, indiquent ces deux dimensions. Les variantes souvent se déconstruisent, chutent parfois, au fur et à mesure de la cure. Bien que leur ténacité fait symptôme. Les invariants relèvent plutôt d’un réel, d’un trou de savoir, inaccessible autour desquels nous tournons ! Portons une attention flottante, ou plus justement une « égale attention » (traduction plus juste), à ces deux dimensions dans la clinique, qui nous guideront vers la poursuite d’une psychanalyse vivante !