Éphéméride 4

Sommaire
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De quoi sommes-nous l’objet ?
par Guillaume Riedlin
Éditorial -
Valete et plaudite. Portez-vous bien et applaudissez !
par Myriam Riegert
Éditorial -
Des temps de rencontre déconfinés
par Jennifer Griffith
ÉCHOS À L’ACTUEL -
Covid-19… Farce tragique, mythe fantasmatique traumatisant ?
par Matthieu Dollfus
ÉCHOS À L’ACTUEL -
Détours de la sidération
par Martin Roth
ÉCHOS À L’ACTUEL -
Au quarantième jour
par Yves Dechristé
ÉCHOS À L’ACTUEL -
Réflexions autour d’un « savoir clinique » – suite
par Cyrielle Weisgerber
Entre divan et théories -
Pour une nouvelle Mythologie – Gare au confinement
par Jean-Richard Freymann
Entre divan et théories -
Un brin de poésie
par Marie-Noëlle Wucher
ÉCHAPPÉES ARTISTIQUES -
Météorologie humaine
par Sophie Néhama
ÉCHAPPÉES ARTISTIQUES -
Peintures
par M.O. Biry Fétique, Lisa, Médée, M.P. Arpin-Bott
ÉCHAPPÉES ARTISTIQUES
De quoi sommes-nous l’objet ?
par Guillaume Riedlin
30 Avril 2020
« La relation éventuelle de la fonction respiratoire avec ce dont il s’agit, le moment fécond de la relation sexuelle, c’est que cette respiration, sous la forme du halètement paternel ou maternel, faisait bien partie de la première étiologie de la scène traumatique, au point d’entrer tout à fait légitimement dans la sphère de ce qui pouvait surgir pour l’enfant de la théorie sexuelle »
J. Lacan, L’angoisse, 1962-1963, Paris, Le Seuil.
De quoi sommes-nous l’objet ? De lecture ? De création ? De désir ? Puisse-t’on être un peu objet d’optimisme, de vie, du souffle de vie, du second souffle qu’il semble que le discours veuille nous proposer. Il pointe une odeur de renouveau dans l’ambiance actuelle entre respect et révolte. Ce discours ambiant nous place en position d’être son objet, qu’est-ce que cela signifie ?
Valete et plaudite. Portez-vous bien et applaudissez !
par Myriam Riegert
30 Avril 2020
40ème jour de confinement, les chiffres continuent de s’égrener…. inlassablement ? Chacun explore son rapport au temps, à la solitude, au flou de la frontière entre pensées normales et pathologiques… Combien ont témoigné de l’étrangeté à certains moments de leurs pensées, de leurs ressentis…voire de leurs actes en ces temps confinés… À l’heure des discussions préparatoires à… quoi… au « déconfinement » ? … les débats reprennent de plus belle ; les dissensions, les divisions, les ambivalences sont perceptibles à plein jour (l’école, les vacances d’été, les restaurants et les bars…). C’est à croire qu’on se trouve plus disposé à accepter l’idée du confinement que celle de sa « levée ».
Persistent des applaudissements à 20h. Qu’est-ce qui pousse les gens à applaudir à 20h, à interrompre leur activité pour se mettre aux fenêtres, aux balcons, pour descendre dans la rue… à interrompre l’apéritif, décaler son dîner, retarder le journal du soir… retarder même l’heure de la traditionnelle d’allocution ?
Des temps de rencontre déconfinés
par Jennifer Griffith
30 Avril 2020
L’après confinement se dessine (voir « Carnaval » de Marie-France Schäfer) alors que nous ne savons ni quand, ni comment ni pour combien de temps.
Pour nous aider à parer à de telles incertitudes, l’art est là. Quand nous ne pouvons pas sortir de chez nous, nous pouvons néanmoins nous déplacer. C’est ainsi que j’ai pu visiter Grenade (Grenade, mes amours de Marie-Noëlle Wucher). Mon regard s’est posé sur ces paysages d’ailleurs dont l’évocation convoque non seulement le regard mais aussi l’écoute et le parfum.
La question du regard, regarder les œuvres artistiques, regarder les scènes prestidigitées, dans leurs textures multiples et colorées. La question du regard aussi par rapport à notre pratique actuelle. Marcel Ritter l’évoque dans l’Éphéméride 1. « Mais qu’est-ce qu’on voit au juste » se demande, nous demande Guillaume Riedlin, face aux flux d’images relatives à la pandémie.
Covid-19… Farce tragique, mythe fantasmatique traumatisant ?
par Matthieu Dollfus
30 Avril 2020
« Et l’humain alors apparaît comme étant ce qui reste, quelque peu en lambeaux, de l’arachnéen traversé par cette espèce de météorite aveugle qu’est la conscience »1.
Homme de réseau. Fernand Deligny se présente ainsi. Le réseau n’étant pas de projet mais de tissage, à l’instar de l’araignée qu’il aimait appeler de son nom ancien aragne. Car à partir du moment où la pensée d’un projet survient un faire advient qui tue dans l’œuf ou la toile tout procès de tissage. Pensée en contre-point de la psychanalyse. En contre-point seulement, pas opposition.
Éphéméride… Le mot évoque le rendez-vous suivant ? Ou le dernier ? Il me ramène au calendrier de l’Avant, chrétien, où l’on ouvrait chaque jour dans le mois qui précède la fête de la naissance du petit Jésus une petite porte qui faisait apparaître le numéro du jour et cela jusqu’Au jour de la libération des jouissances, angoisses et insatisfactions tant attendues. Se sentir plus aimé, moins aimé que les autres ? Mal aimé, toujours ! Ce texte ou un autre appartiendra-t-il à l’éphéméride de l’Avant de la Fédépsy ? De l’après ? Celui d’avant la fin de l’humain ? L’humanité, terrassée par un petit virus qui permet aux grandes institutions du monde de nous jouer une farce-tragique ?
Détours de la sidération
par Martin Roth
30 Avril 2020
La névrose résiste au temps moderne
La névrose n’est toujours pas morte. Elle ne se tait pas. Peut-être faut-il tendre l’oreille pour entendre ses méandres discursifs, mais ceux-ci persistent. Les modifications plus ou moins bruyantes, plus ou moins insidieuses, des discours alentours donnent de nouvelles formes expressives aux conflits névrotiques. Mais elles ne les anéantissent pas. Elles les empêchent, ça oui ! C’est même leur objectif. Étouffez les bruits des pulsions ! Taisez la voix surmoïque qui pousse à jouir ! Détruisez la moindre manifestation du si subversif désir ! Le discours ambiant cherche la normativité, le conforme, le confiné à la statistique commune. Lisez Le conformiste de Moravia pour voir d’où peut provenir et où peut mener l’exigence d’être conforme. Le discours ambiant tente d’astreindre le moi à une seule voie possible. Réminiscence illusoire d’une image partagée. En cela ce discours véhicule une certaine morale éducative aux échos d’autorité. Recette classique pour asseoir un pouvoir. La névrose est bien là pour rappeler l’échec de cette tentative. L’insurrection névrotique dénonce le lieu de la répression.
Au quarantième jour
par Yves Dechristé
30 Avril 2020
Nous voilà au quarantième jour du confinement ! Quarante jours qui résonnent avec les 40 jours de jeûne du Christ dans le désert au cours desquels le diable vient le tenter mais il résiste. Un parallèle est fait dans le catéchisme de l’église catholique entre la tentation du christ, celle d’Adam, et le livre de l’exode dans lequel les hébreux voyagent pendant 40 ans dans le désert après avoir traversé la mer Rouge avant d’atteindre la terre promise. Le nombre de quarante jours est également la durée du Déluge pendant lequel l’arche de Noé flotte sur les eaux dans le livre de la genèse. Ou encore les quarantièmes rugissants, ces grands vents de l’hémisphère sud que doivent affronter les voiliers dans le Vendée Globe. Quarante jours d’épreuves à affronter avant d’accéder à un moment plus favorable, plus paisible, à la liberté !
Réflexions autour d’un « savoir clinique » – suite
par Cyrielle Weisgerber
30 Avril 2020
« Savoir clinique », « savoir sur la clinique », « savoir entendre la clinique » ?… comment faudrait-il dire ?
Quelque chose a à voir avec du savoir, dans le rapport à la clinique. Et ne s’y résume pas. Je proposais la semaine passée : « entre poésie et savoir ? »1
Si je m’avance un peu du côté du savoir, malgré toutes les précautions qu’il me faut prendre de ce côté-là – attention ! le savoir peut se transformer en discours sclérosé sclérosant, pétrifié pétrifiant….
Si je m’avance un peu, au bord du précipice, que pourrais-je en dire ?…
Il y a du savoir-entendre, du « savoir-permettre-de-parler » aussi, de la technè. C’est toute une affaire, que d’accéder à la possibilité de parler et n’être pas seulement le jouet des discours, et jusqu’au jouet de sa propre parole.
Pour une nouvelle Mythologie – Gare au confinement
par Jean-Richard Freymann
30 Avril 2020
Cette affaire d’épidémie renvoie à une sorte d’arbitraire du réel, où chaque jour chacun peut s’interroger : Vais-je aujourd’hui quitter le navire de la vie ? Ai-je serré les mauvaises mains ? Ai-je pris le souffle (non pas du divin) mais du malheur ? Vais-je rencontrer l’enfant qui va m’épidémiser ? Y aura-t-il de la place pour me réanimer ? Serai-je entouré par ma famille confinée ? Et ciel ! À quel moment le nuage de la « maladie » et de la mort va-t-il s’éloigner ? Va-t-on m’oublier eu passage ?
J’ai eu la chance pour l’instant de pouvoir consulter par téléphone, d’utiliser WhatsApp, Skype, d’échanger avec des amis et j’ai été frappé par le pouvoir du téléphone, par cet amour d’un « Dire » qui vient nous rappeler que vous êtes encore en vie.
Mais quoi qu’il en soit l’amitié vient à garder une portée considérable. L’idée de solitude vient à reprendre une grande importance dans un mélange terrorisé de craintes et de méditation.
Un brin de poésie
par Marie-Noëlle Wucher
30 Avril 2020
Je n’ai pas de pain pauvresse
à donner aux moineaux Il me reste l’aube l’aube azurée et blonde qui guette à la fenêtre Le jour point
les portes sont verrouillées Mais surgit le poème
peut-il braver la mort ?
La poésie, c’est ce qui reste de beau quand tout est sali
Il reste une page blanche à écrire à réinventer Aragon et Char
ont fermé les paupières
Météorologie humaine
par Sophie Néhama
7 Mai 2020
Peintures
par M.O. Biry Fétique, Lisa, Médée, M.P. Arpin-Bott
30 Avril 2020