Quelques remarques, en vrac, à propos de la pratique de l’analyse en ce temps de confinement.
Les prises de position sont variables. Certains ont fermé leur cabinet jusqu’à nouvel ordre. D’autres continuent de recevoir des analysants, mais dans le strict respect des recommandations concernant « les barrières ». D’autres encore ont opté pour la pratique des séances par le moyen de la vidéo ou par le téléphone.
Notons que lors des séances par vidéo, l’image du corps de l’autre est présente, autant celle de l’analysant que celle de l’analyste, alors que le corps réel est absent. Et lors des séances par téléphone, le corps de l’autre est absent en permanence, autant sur le plan de l’image que sur celui du réel.
La question se pose de savoir quelles peuvent être les conséquences de ces changements, certes temporaires, au niveau du transfert, mais aussi au niveau de l’écoute de l’analyste.
Est-il obligé d’être, consciemment, « plus concentré » sur le discours tenu, au risque d’être en contradiction avec la recommandation de l’attention dite « flottante » ?
Par ailleurs, la voix, l’objet voix, prend une importance primordiale pour l’un et pour l’autre avec l’absence du regard au moment de l’entrée et de la sortie du cabinet – moments qui pouvaient donner lieu à des interprétations transférentielles de la part de l’analysant, par exemple « j’ai vu à votre mine que vous n’étiez pas content de ce que j’ai dit ».
Il est tout autant soutenable que la situation actuelle favorise la seule relation de parole, la relation symbolique, par rapport à ce que Lacan a appelé « l’intersubjectivité imaginaire » (Séminaires 1).
Mais quand la voix disparaît, c’est l’angoisse qui apparaît, comme c’est le cas dans le rêve lorsque je ne suis plus en mesure de prononcer une parole, et que je me réveille dans un état de panique.
Sommes-nous alors en proie à un vécu de détresse, à une « Hilflosigkeit », à l’immanence du surgissement de la Chose, laquelle n’est plus recouverte par l’objet a ?
La Chose est-elle présentifiée par la menace invisible, et pourtant réelle et consciente de la mort, identifiée au coronavirus ? La mort, dont l’homme ne veut rien savoir dans son inconscient, puisqu’il s’y croit immortel – référence à Freud, et au désir indestructible dans l’inconscient.