
L’inconscient, c’est le politique
Animé par:
8 avril à 20 h 00 min - 22 h 00 min
Séminaire « L’inconscient, c’est la politique ».
Yves Dechristé – Daniel Humann
Nous avons débuté ce séminaire en 2022, fortement intrigué par cette « formule » devenue célèbre, « l’inconscient c’est la politique », énoncée dans La logique du fantasme, leçon du 10 mai 1967. Formule qui résonne plutôt que ne raisonne, avec les questions de la clinique actuelle, que le psychanalyste se doit d’interroger.
Au cours de ces deux premières années, nous avons cherché à reprendre les concepts fondamentaux abordés par Lacan dans cette leçon ; la névrose de base de Bergler, la question du masochisme primaire et secondaire, le fantasme « un enfant est battu », la question de la métaphore paternelle, qu’est-ce qu’une névrose, la question de l’acte pour ne citer que les principaux.
Ayant avancé sur le chemin où nous invite Lacan, à présent mieux « armé », nous voilà à présent face à cet os, cette pierre sur laquelle nous buttons, cette énigme, avec cette dimension de mystère, « l’inconscient, c’est la politique ».
Formule qui résonne donc avec la définition que Lacan a donné antérieurement de l’inconscient, « l’inconscient, c’est le discours de l’Autre ». Si le désir du sujet est d’abord désir de l’Autre, l’Autre devient ce lieu auquel le sujet adresse ses questions sur son existence, sur son être. Dans cette demande adressée à l’Autre de combler cette faille de savoir sur son être, le sujet est aliéné à l’Autre, aliénation redoublée de ce que l’Autre lui-même est barré par le langage, ne pouvant apporter de réponse dernière. Dans cette adresse à ce semblant d’Autre, « l’Autre n’existe pas », le sujet fait l’expérience qu’il n’y a pas de vérité dernière, vérité qui ne peut que se mi-dire. Il y aura toujours un reste pour dire le sujet, un réel insaisissable, l’objet a ou « plus de jouir ». Dans son questionnement le sujet est exposé à la jouissance de l’Autre, comme à l’énigme de sa propre jouissance.
Cette relation du sujet à l’Autre permet à Lacan de dégager ce qu’il avancera plus tard dans L’envers de la psychanalyse, les paramètres du discours avec ce quadripode ; le semblant, la vérité, la jouissance, le plus-de-jouir. La jouissance dit-il, « c’est dérangeant », c’est ce qui fait que ces paramètres tiennent ensemble pour constituer des discours, une forme de lien social. Relevons que pour les trois premiers discours, du Maître, de l’universitaire, de l’hystérique, ce qui est mis en place d’agent, ce qui commande, c’est le signifiant. On peut évoquer ici que le discours commun est lui aussi marqué par des signifiants qui commandent, qu’ils viennent du milieu familial, culturel, social ou politique. Ces signifiants qui nous commandent, nous commandent d’autant plus qu’on les méconnaît. Et ces discours ne sont pas sans engendrer une certaine subjectivité. Mais la subjectivité, ce n’est pas le sujet, c’est même tout le contraire.
Le discours de l’analyste, comme quatrième discours, se distingue des trois autres par le fait ce qui commande, ce n’est plus le signifiant, c’est l’objet, l’objet a.
C’est l’occasion de rappeler la fonction des entretiens préliminaires, temps préalable qui vise à permettre des changements de discours, comme une sortie du discours commun. Pas d’entrée dans l’analyse sans entretiens préliminaires ! L’interprétation viendra dans un deuxième temps, comme ce qui permet le passage au discours de l’analyste. Par le jeu sur l’équivoque, le signifiant perd son sens, elle produit de l’écart, écart entre deux signifiants, béance, manque, qui lui-même crée de l’objet a. C’est ainsi que l’on peut comprendre la position de l’analyste ; celle du semblant d’objet a mis en position d’agent qui commande, objet a qui donne sa substance au sujet.
L’expérience à travers l’histoire des discours médicaux, particulièrement hygiénistes, comme les écrits philosophique (Foucault) nous montre combien la politique s’intéresse au rapport entre les sexes. Or qui dit sexe, dit corps, rapport entre deux corps, et donc jouissance. Il n’y a pas de jouissance sans corps. Tous les discours sur les stéréotypies de genre, les identités et orientations sexuelles, à ne rester que dans les signifiants, ratent ce qu’il en est du réel de l’être parlant. Sortir du bla bla contemporain sur la vie sexuelle, ne peut se faire que par la reconnaissance de ce que Lacan avance, « il n’y a pas de rapport sexuel ».
« L’inconscient c’est la politique » nous invite donc à explorer cette question des discours, dans lesquels le sujet est aliéné. Ils constituent un mur qui à la fois renvoie au sujet comme en écho une possible jouissance totale, tout en les séparant de ce qu’il cache, le réel de l’être parlant. La position, ou la politique ? de l’analyste, n’est-ce pas amener l’analysant à toucher au réel, à cette béance qui nous commande, et qui définit le sujet ?
C’est pour avancer sur ces questions que nous proposons d’aborder les thèmes suivants :
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Il y en a « au-moins-un », la structure et la politique
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Savoir et vérité
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Le discours analytique comme quatrième discours
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Le discours du capitaliste
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« Il n’y a pas de rapport sexuel » et le tableau de la sexuation
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Politique et sexualité contemporaine
Les séances auront lieu en présentiel à Colmar, le deuxième mardi du mois.
Vous pouvez prendre contact avec Yves Dechristé par mail : yves.dechriste@ch-colmar.fr, ou Daniel Humann, daniel_humann@hotmail.fr