Texte rédigé à partir du séminaire FEDEPSY du 6.10.20, « Freud à son époque et aujourd’hui », animé par Dimitri Lorrain et Yves Dechristé.
J’aimerais vous parler du Monde d’hier de Stefan Zweig, plus précisément de trois chapitres de cet ouvrage : la « Préface », « Le monde de la sécurité » et « Universitas vitae ». Je me concentrerai donc sur le début de cet ouvrage. Pour travailler sur le contexte culturel de l’œuvre de Freud et sur le geste de Freud dans ce contexte, Le Monde d’hier est à ma connaissance une excellente présentation. Mon propos prendra la forme d’une sorte de zig- zag entre des réflexions psychanalytiques, culturelles, mais aussi sur la littérature.
Dans son dernier ouvrage, Delphine Horvilleur, rabbin Mouvement juif libéral de France et directrice de la rédaction de la Revue de pensée(s) juive(s) Tenou’a2, interroge la relation entre l’interprétation juive et l’interprétation psychanalytique. La lecture de ce livre est fort féconde pour le psychanalyste parce qu’il rappelle et élabore des questions absolument fondamentales pour notre champ.
J’aimerais ici vous proposer quelques associations sur cette réflexion passionnante – et pleine d’esprit. Plus encore, je vais vous proposer une présentation de son propos, déployée dans une élaboration – et donc une interprétation – personnelle.
À la lecture des différents Éphémérides depuis le début de cette séquence liée au Covid- 19 et au confinement, le terme qui me vient est celui d’« aventure ».
Dans sa proposition du 9 octobre 1967, Lacan rappelle que la « naïveté » est une qualité fondamentale de l’analyste. Ailleurs, il parlera de « laisser-être ». Sans doute essaie-t-il ici de pointer, dans le contexte des débats psychanalytiques et intellectuels (liés au structuralisme – dont la fécondité doit être rappelée) de l’époque, orientés vers une exigence de quête de la signification, le lieu d’énigme dont surgit la parole (comme l’écoute) lorsqu’elle se fait subjectivante, ouverte au désir singulier.
Lucien Israël puis Jean-Richard Freymann, pour leur part, parleront dans le même ordre d’idée de « page blanche » et même de « capacité à ouvrir une page blanche ».
Ici une réaction à l’Éphéméride 8 de Jean-Richard Freymann intitulé « Et si l’on cherchait un mythe fondateur de Lacan ? ». J’aimerais insister sur plusieurs points.
Pour ma part, concernant la relation de Lacan à Freud, j’aurais tendance à formuler les choses dans les termes suivants.
Lacan a repris la question de la « sexualité infantile » et de la « vie pulsionnelle » chez Freud. Il l’a analysée pour la décomposer autrement, depuis la structure de la parole. Du coup, il a rendu compte de sa dynamique de manière plus approfondie encore. Pour cela, il est parti de la conflictualité qui habite le fantasme : la conflictualité entre l’imaginaire et le symbolique, le moi et le désir. Cela l’a mené au signifiant et à la manière dont il se déploie dans la parole, et même dont il la structure.
Au regard de l’évolution contemporaine des discours et des mécanismes psychiques, j’aimerais ici insister sur un point qui me semble particulièrement important. Tout un ensemble de discours collectifs avancent de nos jours que la psychanalyse sous sa forme actuelle serait « dépassée » – souvent pour justifier sa minoration institutionnelle. Or cela ne me semble pas juste.
En effet, s’il s’avère que la psychanalyse a pu souvent être dénaturée et devenir dogmatique, et ainsi perdre en créativité, cela n’est heureusement pas toujours le cas. Elle existe aussi de nos jours sous une forme rigoureuse et créative (ce qui est la même chose). Dans ce cas-là, je dirais qu’elle se centre sur la création d’un lien de parole qui crée la situation analytique en tant que telle[1]. Sous cette forme, la psychanalyse élabore sur les critiques qui lui sont adressées. De plus, elle remet au travail ses apports, afin de prendre en compte les subjectivités sous leur forme contemporaine.
Jean-Richard Freymann m’ayant invité à vous parler de mes projets dans le Journal du confinement, j’aimerais ici vous présenter quelles sont mes pistes actuelles de réflexions.
Mais, en cette période trouble et troublée, je voudrais ici commencer par une pensée de vive solidarité pour les Amis et connaissances travaillant aux urgences, en EHPAD, à l’hôpital, en médecine libérale…
J’aimerais aussi en préambule insister sur le fait que ce que je vous présente est à la fois le triple fruit : celui de mon expérience de la psychanalyse visant à devenir analyste ; celui des échanges en un à un avec Jean-Richard Freymann et tout un ensemble d’amis de la FEDEPSY ; et celui de la mise au travail – que j’espère singularisée – des apports de Freud, de Lacan, du freudo-lacanisme fécond, et bien sûr, et en premier lieu, de notre École de Strasbourg.