La Lettre #22 – Juin 2024

Sommaire
-
Faire dérailler le train
par Jean-Richard FREYMANN
Éditorial -
La vie ordinaire des gens sur la terre – à propos de Sud, d'Antonio Soler (Rivages, 2022)
par Thierry VINCENT
Petite Chronique du temps qui passe -
Qu’est-ce qu’une pulsion freudienne ?
par Jean-Richard FREYMANN
Échos des séminaires -
Lecture et présentation du livre « Psychodrame analytique lacanien », de Liliane GOLDSZTAUB
par Eva-Marie GOLDER
Cabinet de lecture
Faire dérailler le train
par Jean-Richard FREYMANN
24 Mai 2024
À chercher l’essentiel, on s’y perd… enfin.
Après 45 ans, ou 50 ans de pratique, je crois que l’on pourrait en tirer quelques fils.
Hier, j’ai vu, à Metz, l’exposition sur Lacan et je n’en ai pas été déçu ?
On pourrait faire bien des commentaires, mais il suffirait de dire : quelle créativité !
Ce n’est pas tellement la question, de la manière dont on va « enfiler les perles », mais quelle créativité.
Lacan fait partie de ceux qui ont fait dérailler les trains du conformisme, et il n’y en a pas beaucoup.
Faire dérailler le train, n’est-ce pas l’image de la résistance ?
Le problème qui se pose, c’est qu’il n’y a plus beaucoup de gares.
Pour repérer une nouveauté, il faut un cadre, et dans notre champ, un cadre théorique.
Puis-je vous parler de manque, du vide, de la perte… de l’absence, sans parler de : fonction paternelle, de métaphore, du sinthome et j’en passe et des meilleurs.
Pourrais-je parler du vélo, sans sous-entendre le guidon. Alors, comment crée-t-on des guidons ?
La vie ordinaire des gens sur la terre – à propos de Sud, d'Antonio Soler (Rivages, 2022)
par Thierry VINCENT
juin 2024
à propos de Sud, d’Antonio Soler, Rivages, 2022
Que ceux qui cherchent des histoires lénifiantes ou édifiantes passent leur chemin ; des histoires avec une morale et de la justice aussi ; des personnages bien typés « gentils » ou « méchants », tout autant. Pas de critique sociale dans « Sud », en tout pas de celles bien appuyées sur les repères classiques déclinant l’évangile selon Marx, Jésus ou n’importe quel autre prophète. « Sud » narre la vie ordinaire de gens ordinaires dans un pays ordinaire occidental. Dans une de ces démocraties comme les haïssent les Poutine, Xi Ping et autres Khamenei, parce qu’elles façonnent selon eux des dégénérés, alibi bien commode pour escamoter leur haine fondamentale de l’Autre, un Autre sensé s’incarner chez nous dans ce qu’on appelle « les Droits de l’Homme », lesquels révèlent immanquablement aussi la part d’ombre de chacun. Or le roman est une des formes que peut prendre cette révélation.
« Sud » est l’histoire ordinaire d’un groupe de gens plus ou moins disparates, plus ou moins liés entre eux (mais c’est sans grande importance) un unique jour d’été dans le sud espagnol, terrassé par le « Terral » un vent sec et chaud passant pour rendre apathiques ceux qui le subissent. En réalité les personnages de Sud sont tout sauf apathiques, tant le livre les cueille au niveau pulsionnel.
Qu’est-ce qu’une pulsion freudienne ?
par Jean-Richard FREYMANN
juin 2024
Voici la transcription de la séance du 16 avril 2024 du séminaire de Jean-Richard Freymann : elle rassemble et approfondit les élaborations essentielles apportées sur la thématique de l’année.
Nous allons aborder aujourd’hui la question du rapport très délicat entre la question des pulsions et la question du fantasme, ou des fantasmes. C’est une question que j’ai pas mal travaillée et cette année c’est un peu le point sur lequel je veux qu’on aboutisse. Pour vous montrer qu’il y a une espèce de confusion, que Freud interroge d’ailleurs, que Lacan confond aussi par moments, entre ce que seraient les scénarios pulsionnels et le scénario fantasmatique. C’est un point qui est important parce que ça reprend un peu toute la pathologie psychanalytique. Et Lacan s’est arrêté à cet endroit-là, Freud aussi.
Lecture et présentation du livre « Psychodrame analytique lacanien », de Liliane GOLDSZTAUB
par Eva-Marie GOLDER
juin 2024
Au fur et à mesure de ma lecture du texte[1] de Liliane Goldsztaub, le souvenir d’une lecture a pris forme. En quoi la formation du comédien touche à l’expérience du psychodrame ? L’un parle de donner forme à un texte en l’interprétant, l’autre, de donner forme à un texte qui ne cesse pas de ne pas s’écrire. « Ed è subito sera » est cette surprise qui surgit dans un donné. Ah oui, je n’avais pas vu cela, et pourtant c’était là !
Notre époque vante l’individualisme, chacun pour soi revendique tous les rayons du soleil rien que pour lui tout seul. Le groupe n’a d’intérêt que s’il met en valeur l’intérêt de l’individu. Les groupes se créent selon l’opportunité. Quand ils se défont, il n’est pas rare que la violence se déchaîne. Chacun avait oublié que ce qui fait lien c’est l’altérité et pas l’essentialisation de la petite différence.